Le presbytère de Treillières, résidence du recteur (curé), n’a été pendant longtemps qu’une humble maison.
Aux 16e et 17e siècles
En 1564 le Visiteur épiscopal trouve la maison presbytérale dans un bien piteux état : «Domus pbrales indigent maxima reparationes».
Un acte notarial de 1634 nous la décrit très sommairement : «Est le pourpris et maison presbytérale du dit Trelière, composée d’une salle basse, une chambre haute… cour et jardin.., le tout contenant un journal de terre environ…».
Au 18e siècle
En 1759, le recteur Denis Renaud, natif de Treillières, fait rebâtir presque entièrement le presbytère. Profitons de l’expertise des lieux réalisée le 21 décembre 1772, à 8 heures du matin, par Jean Gourhand, charpentier à La Rinçais, pour faire le tour du propriétaire :
«Visité le grand portail nous avons remarqué qu’il avait été fait a neuf… pareillement la petite porte y joignante… les piliers de maçonnerie du grand et petit portail ainsy que leurs chapeaux au dessus ont été recrépi et garnis avec pierre et mortier de chaux et sable tant en dehors qu’en dedans.
L’écurie à côté du grand portail a été réparée… la boulangerie et le four ont été réparés il en est de même du grenier et couverture d’ardoises au dessus des dittes écuries et boulangerie.
Le toit au vacher et la petite chambre à côté du logement principal ont ete bien réparé.., la couverture en tuiles qui existaient on l’a refait en ardoises ce qui est bien plus solide. Les murs des dits logements ont été en partie fait de neuf au lieu d’être seulement recrépis a chaux et sables.
L ‘entrée du vestibule ainsy que la porte d’icelle tant du côté de la cour que jardin sont bien réparés.
…au lieu de la première volée d’escalier en bois il en a fait construire une autre volée en pierre et le surplus à neuf en bois — que de l’ancienne cuisine il en a fait un beau salon au dessus duquel il a fait construire une chambre fort propre, un grand grenier également au-dessus d’icelle…
Nous avons visité la chambre où nous sommes, le sallon nouvellement construit l’escalier, la chambre du sallon, le cabinet au dessus du corridor ou vestibule, les trois chambres et cabinets au dessus de la cuisine actuelle et dégagement au devant d’iceux ainsy que les greniers…
Le mur de cloture de la cour et ceux du pressoir ont été réparés, on a placé au pressoir la poutre du dessous. Le surplus des réparations du dit pressoir n’a pas été fait, mais nous avons vu que les bois nécessaires pour les réparations manquantes sont sciés en partie préparés pour être employés.
Passant à la visite des haies tant du jardin que du petit pré à côté et deux autres prés dépendants du domaine de la cure, de la vigne et des haies en dépendant nous avons remarqué que le tout est rempli en conformité du dit procès verbal».
Le bourg en 1830 : église, cimetière, presbytère…
En 1851 l’élargissement de la rue principale rabote le portail du presbytère
Au 19e siècle : le presbytère du curé Ménoret
Le presbytère reconstruit en 1759 avait beaucoup souffert sous la Révolution quand il servit de caserne aux troupes républicaines de passage. On le rafistola sous l’Empire et la Restauration. L’élargissement de la rue principale du bourg en 1851 frappe d’alignement le portail. On le reconstruit en 1860 ainsi que la boulangerie et la grange « dans un état de délabrement complet ». Ensuite, par un subtil jeu de dominos le curé Ménoret fera reconstruire tous les bâtiments contigus sans oublier les annexes :
- en juillet 1863 : une « écurie à porcs »
- en juin 1865 : l’étang est recreusé, le jardin aménagé et des terres achetées pour « y nourrir et pâturer les animaux » du curé.
Maintenant que les bâtiments secondaires ont été rebâtis ou restaurés, le curé Ménoret veut reconstruire le corps principal du presbytère servant de logement. Le devis présenté par l’architecte Mathurin Fraboulet s’élève à 15 000 F. C’est beaucoup pour une petite paroisse qui vient de dépenser 3 000 F pour des « écuries à porcs » et des pâtures pour le bétail du recteur.
Le budget est ainsi établi :
- la paroisse versera 2 000 F.
- on espère récupérer 2 000 F. en vendant les vieux matériaux.
- on sollicite 5 000 F. du gouvernement (ils seront accordés le 26 mars 1869).
- la commune s’engage, le 27 août 1868, pour 6 000 F. remboursables au moyen de 10 centimes additionnels à percevoir pendant 11 ans.
Six adjudicataires se présentent pour effectuer les travaux. C’est un entrepreneur de Nantes, Claude Ganuchaud, qui l’emporte le 19 mai 1869. Le chantier est bientôt lancé.
En juin 1869 le curé Ménoret réclame une cave ; accordée.
A la réception des travaux, le 28 janvier 1871, la facture s’élève à 15 401,66 F.
Derniers travaux :
1878 : en juillet le curé Ménoret fait installer une serre dans le jardin et construire « une petite maison dans le verger de la cure » pour y loger son domestique ;
1889 : il décide de tapisser les pièces et de mettre des persiennes aux fenêtres de la façade sud. La paroisse paie tout sans rechigner.
Maintenant le presbytère a fière allure et on ne le modifiera plus avant bien longtemps.
Au 20e siècle : 1907 le presbytère bien communal
Pour compléter la loi de Séparation des Eglises et de l’Etat (9 décembre 1905) une loi du 2 janvier 1907 sur l’exercice du culte ordonne le retour aux communes des églises paroissiales et des presbytères.
Elle précise que les curés ont la jouissance gratuite des églises (entretenues maintenant par les communes) de leurs meubles et ornements. Quant aux presbytères et à leurs dépendances, la Préfecture dans un souci d’apaisement accepte qu’on les loue aux curés au quart de leur valeur locative réelle.
Le Conseil municipal de Treillières « composé exclusivement de bons catholiques » (curé Paquelet) propose de le laisser au clergé paroissial gratuitement. Le Préfet exige un loyer, même symbolique. Le 30 novembre 1907 un bail de location passé entre la municipalité et le curé pour une durée de 3 à 18 ans au gré du locataire fixe un loyer de 87,50 F et précise que les assurances et impôts pesant sur le bâtiment seront pris en charge par la commune.
Jean Bourgeon
Le presbytère dans les années 1930
Visite du presbytère du curé Ménoret en 1889
A l’étage :
4 lits avec « sommier, couette, matelas, couverture, couvre-pieds, oreiller, carrée de lit avec rideaux, descente de lit »,
Un secrétaire en acajou, un prie-Dieu…
Une commode, une armoire contenant « 30 chemises, 12 gilets de flanelle, 8 caleçons… » des bas, des chaussettes, des mouchoirs, des serviettes de table, des torchons, des nappes…
A la cuisine :
Une table de cuisine, un buffet à étagère.
En plus des légumes de son jardin, Mr le curé consomme des fruits secs et apprécie les nouveaux produits des conserveries nantaises. On trouve dans sa cuisine :
« quatre boîtes de homards, quatre de sardines, trois de thon,
quatre de petits pois, quatre de haricots,
un sac de haricots secs,
une boîte de prunes, une boîte de figues,
un sac d’amandes, un sac de noisettes,
un sac de café,
un sac de riz,
un sac de vermicelle ».
A la cave creusée en sous-sol le curé a rangé :
« 220 bouteilles de vin muscadet,
160 bouteilles de gros-plant de la récolte 1888,
une barrique de vin rouge,
une cave à liqueurs à 16 verres,
20 bouteilles de vin vieux bouché,
2 bouteilles de Kirsch,
2 bouteilles de curaçao blanc,
une bouteille de fine Champagne,
une bouteille de rhum,
deux de menthe ».